Depuis quelque temps, le discours sur le développement d’Haïti a pour orientation l’entrepreneuriat et les conséquences favorables que nous lui connaissons. Cette propagande cible particulièrement les jeunes, groupe majoritaire au sein de la population accusant un fort taux de chômage et dont le besoin d’autonomie est difficile à satisfaire, faute de moyens économiques. Parmi ces jeunes, beaucoup ont la velléité d’entreprendre mais ne s’y risquent pas parce qu’en plus des difficultés auxquelles ils devraient faire face pour créer leurs entreprises, ils n’ont aucune idée de quoi entreprendre ou des marchés porteurs vers lesquels s’orienter.
D’une manière générale, on définit un marché porteur comme un secteur d’activité économique ayant une forte croissance et permettant l’émergence de nouveaux acteurs. On peut donc y introduire de nouvelles entreprises et grâce à l’innovation, espérer les voir se développer vu les perspectives de croissance qui leurs sont offertes. C’est donc dans ces secteurs que tout entrepreneur avisé devrait investir, mais étant donné que les informations sur l’évolution des activités au niveau des secteurs primaires, secondaires et tertiaires ne sont pas vulgarisées, un jeune ayant des ambitions entrepreneuriales devrait murement réfléchir avant de se lancer dans la réalisation d’un projet. Le moyen le plus facile d’y arriver est d’observer les tendances, de repérer les besoins et de saisir les opportunités nées d’une crise.
Dans le Plan de Relance Economique (PRE) publié en août 2010 par la Commission Présidentielle sur la Compétitivité en collaboration avec OTF, il est fait mention de plusieurs secteurs d’activité jugés porteurs en Haïti. Trois ans plus tard, la situation n’a pas beaucoup évolué et les conclusions du rapport restent tout aussi pertinentes. Pour les identifier, ces organismes ont procédé à une analyse du potentiel de différents secteurs économiques afin de déterminer dans quels domaines il faudrait investir pour assurer à la fois, la croissance économique du pays et une amélioration de la situation financière au niveau micro-économique.
Considérons d’abord le secteur primaire, la collecte et l’exportation des fruits est considérée comme une activité intéressante vu les possibilités qui existent sur le marché américain et puisque la qualité de certains produits peuvent permettre aux entrepreneurs haïtiens de trouver un créneau (i.e. un marché réduit d’intérêt pour les petites entreprises) et de s’y maintenir. Parmi les fruits répertoriés, nous avons la mangue qui se vend bien à l’étranger depuis quelques temps. Si bien qu’en 2011, Haïti était le 6ème exportateur de mangues vers les États-Unis. Les activités liées à élevage ne sont pas non plus en reste. L’investissement dans les filières avicoles, apicoles de même que l’élevage de bovins et de caprins sont encouragés. La production des œufs ainsi que la production laitière sont particulièrement préconisés vu que ces activités peuvent contribuer à la réduction des importations et au rétablissement de l’équilibre de la balance commercial du pays. L’ONG Double Harvest situé à la Croix-des-Bouquets et Caribbean Harvest offrent de très bon modèle de fermes à reproduire.
Ensuite, dans le secteur secondaire, sont priorisées les industries du tourisme et des textiles pour lesquelles on recommande respectivement de différencier l’offre par rapport aux forfaits soleil-plage offerts par les concurrents régionaux et d’investir dans la fabrication de produits ayant une plus grande valeur ajoutée. Avec les efforts que déploie le Ministère du Tourisme pour la promotion des activités touristiques et la création d’incitatifs en vue de contribuer à un développement accéléré de ce secteur, des entrepreneurs aux idées novatrices devraient être en mesure de tirer leurs épingles du jeu en créant des produits exprès pour ces étrangers ou en adaptant des services de type récréation ou restauration.
A coté de ces deux industries, la construction parait tout aussi attrayante vue l’impérieuse nécessité de penser à de nouveaux types d’habitat. Mais en règle générale, le secteur de la construction exige au départ des fonds importants pour se doter en équipement et on préfère un niveau d’expertise élevé aux firmes évoluant dans cette sphère. En considérant d’autre part que les jeunes entrepreneurs manquent de fonds dès le départ, la construction semble une entreprise hors de leur portée. Cependant, avec un certain sens de créativité, ces derniers ont la possibilité de proposer des produits connexes ou des services rattachés à la construction. Par exemple, apporter des solutions aux problèmes courants de toiture, proposer des éléments préfabriqués pour l’aménagement intérieur des maisons ou travailler la ferronnerie dans les standards internationaux afin de l’intégrer dans les structures de bâtiment.
Mais comme nous l’avons mentionné au départ, des jeunes désireux d’investir en Haïti doivent relever de nombreux défis avant de réaliser leurs rêves d’entrepreneurs. Même en sachant quels secteurs d’activités sont particulièrement prometteurs, ils doivent faire montre énormément de débrouillardise afin de trouver une manière de contourner les obstacles que constituent leur absence de relations, de moyens financiers et leur inexpérience. L’idéal serait qu’ils puissent trouver des activités exigeant peu de capitaux de départ, ou de surmonter leurs réticences par rapport l’idée de s’associer à d’autres partenaires afin de réunir une somme suffisante pour se lancer. A court terme, vu que le besoin en capitaux deviendrait impérieux, ces derniers pourraient alors contacter des investisseurs pour pallier à l’étau financier se profilant durant l’exploitation de l’entreprise.
Pour continuer, le domaine de la technologie offre aux jeunes de nombreuses possibilités. A l’étranger, la tendance est au tech et web start-up. L’idée derrière ce concept est d’associer la technologie avec un besoin rencontré par des entreprises ou une certaine clientèle. Par ici, les jeunes peuvent aussi bien créer des logiciels, développer des applications, des jeux, et les adapter aux goûts et aux besoins du consommateur haïtien. Tout ce qu’il leur faut, c’est de l’enthousiasme et des idées novatrices. On notera que le marché haïtien offre de grandes opportunités dans ce domaine et que lancement des téléphones Android offerts par Digicel et Natcom à des prix abordables laisse présager un développement considérable de ce marché dans les années à venir. De plus, l’éducation de la population ne pourra que favoriser l’accroissement de la demande pour ce genre de produit.
Le plus important à retenir, c’est que les jeunes, surtout les universitaires, doivent penser à entreprendre. Les opportunités sont là, les modèles existent et pour couronner le tout, ils n’ont pas beaucoup de responsabilités sur le dos ce qui devrait les pousser à s’impliquer plus tôt et plus rapidement qu’un homme marié ou un père de famille. Avec la possibilité que nous donne l’internet, les informations et les expériences sont partagées plus facilement, les connections avec les personnes clés se font en quelques clics et les portes de sortie paraissent plus évidentes. On ne se sent jamais prêt lorsqu’il faut se lancer en affaires. Il faut tout simplement se lancer.
Michèle D.